Coup d’œil sur les collections patrimoniales : la bibliothèque de Marie-Paule Salonne

Derrière les murs de la bibliothèque se cachent bien des trésors. Au-delà des rayons accessibles aux lecteurs se trouve le fonds patrimonial. Celui-ci est constitué de nombreux documents (livres, manuscrits, photographies, cartes postales, estampes, objets, etc.) anciens ou contemporains qui proviennent de dons personnels, d’associations (Société des amis du musée et de la bibliothèque) ou d’achats. Les dons de bibliothèques personnelles représentent bien plus qu’une succession d’ouvrages. Ayant souvent appartenu à des figures locales, ces bibliothèques sont souvent le reflet de leur personnalité. Prenons ici l’exemple du don Marie-Paule Salonne.

Née en 1902 à Morlaix et décédée en 1947 à Plancoët, Marie-Paule Salonne s’est fait connaître en tant que poétesse et écrivaine. Elle a publié huit recueils de poésie, un roman et un essai sur l’écrivain Chateaubriand. En 1947, elle reçoit le prix Montyon décerné par l’académie française pour son ouvrage Fends la bise : scène du maquis breton, qui évoque la résistance bretonne lors de la Seconde Guerre mondiale (maquis de Moncontour, Côtes-d’Armor). Elle est, de plus, la fille de Marie Le Gac-Salonne, une pionnière du féminisme en Bretagne, à une époque où cette question est loin d’être répandue en province.

Le don de sa bibliothèque date d’il y a quelques années maintenant. L’heure est aujourd’hui au catalogage de ces ouvrages. Cataloguer consiste à répertorier tous les documents présents, dire qui en est l’auteur, quel est le titre, l’éditeur,… Et surtout, sachant qu’il s’agit d’une bibliothèque personnelle, de rapporter les particularités des ouvrages c’est-à-dire les dédicaces, les notes manuscrites, etc. La bibliothèque de Marie-Paule Salonne se compose de documents assez classiques : des romans, des recueils de poésie, des brochures, etc. Bien que le don porte son nom, tous les documents n’ont pas nécessairement appartenu à Marie-Paule Salonne. Certains étaient à sa mère Marie Le Gac-Salonne, à sa sœur Louise Salonne, connue comme dessinatrice et illustratrice ou encore à sa fille, Viviane Duvignac-Salonne. Quel est donc l’intérêt de conserver et de répertorier ce type de don ?

Exemples d’ouvrages annotés ou personnalisés
constituant la bibliothèque de Marie-Paule Salonne.

Une bibliothèque personnelle représente bien plus qu’une suite de romans, de recueils ou de documentaires. Au fil du catalogage la personnalité de son propriétaire se dessine. Ouvrir un roman c’est parfois trouver sur la page de titre une dédicace personnalisée de l’auteur, une réflexion du lecteur, une lettre reçue et coincée au milieu des pages, des fleurs séchées ramassées au cours d’une balade. En découvrant tout cela, le livre nous dit qu’il a voyagé dans les mains de son propriétaire qu’il a été un cadeau précieux marquant peut-être une étape de la vie, ou encore l’héritage d’une personne proche. Les dédicaces témoignent des liens de sociabilité que le propriétaire avait. Dans le cas de Marie-Paule Salonne, il est facile de remarquer que certains auteurs lui ont systématiquement envoyé leurs publications avec une dédicace personnalisée. Grâce à cela, il est possible de tracer les liens d’amitié qu’elle entretenait.

Des thématiques ressortent également et permettent d’émettre des hypothèses sur les centres d’intérêt de Marie-Paule Salonne. D’une part, elle possédait plusieurs ouvrages concernant Chateaubriand, des biographies, des essais. Cela s’explique par le fait qu’elle a elle même publié un essai le concernant en 1933, Chateaubriand et les dames de Plancoët. D’autre part, plusieurs ouvrages sur ou écrits par des auteurs défendant l’indépendance bretonne se retrouvent dans la bibliothèque. Marie-Paule Salonne faisait-elle partie de ce mouvement ? Aurait-elle un esprit révolutionnaire ou défendait-elle simplement l’identité bretonne, sa langue et ses coutumes ? Difficile d’en faire une affirmation mais il est clair qu’elle était proche de ce milieu. Enfin, les auteurs féminins tiennent une place importante dans la bibliothèque de Marie-Paule Salonne. Ayant une mère féministe avant l’heure, ils sont certainement le reflet de son éducation, de l’héritage qui lui a été transmis. Là encore, il n’est pas possible d’affirmer quoi que ce soit mais cela ressemble tout de même à des valeurs qu’elle défend.

Note manuscrite de Marie-Paule Salonne au début de l’ouvrage
L’art des vers d’Auguste Dorchain (Fonds Bretagne, Don Marie-Paule Salonne).

Faire don d’une bibliothèque personnelle représente donc bien plus qu’un simple transfert de documents d’un endroit à un autre. Il s’agit de transmettre ce que la personne a été, ce qu’elle appréciait, ce qu’elle pensait, qui elle connaissait. Et vous ? Qu’est ce que votre bibliothèque dit de vous ?

Mathilde.

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