« Histoire du fils » de M. H. Lafon

Les lectures automnales de la sélection du Goncourt nous ont emmenés vers des sujets graves. Nous y avons rencontré un Crime sans importance, des Fous, des Funambules, des Impatientes, des deuils impossibles et bien sûr une Anomalie dans laquelle Hervé Le Tellier, le lauréat du Prix Goncourt, nous raconte la vie des passagers d’un vol Paris-New York bouleversée par un évènement étrange. Ce roman fait exploser les ventes.

Après toutes ces lectures prenantes et passionnantes, que lire ?

Histoire du fils - Marie-Hélène Lafon
Histoire du fils, Marie-Hélène Lafon,
Septembre 2020 – 171 pages- Éditions Buchet Chastel

« Histoire du fils » de M. H Lafon est resté sur l’étagère depuis sa récompense au prix Renaudot en novembre 2020. Il ne va pas échapper, pensé-je, à l’inévitable douleur et aux déchirements des secrets de famille qui sont l’actualité littéraire de ce début d’année.

Agréable surprise que ce court roman de 171 pages, à l’écriture ciselée, subtile, sensuelle, caustique, émouvante, qui diffuse des moments de bonheur et de joie et un formidable goût de vivre. Pourtant qu’ils sont lourds les secrets et les drames que vivent tout au long du siècle les différentes générations que la romancière nous dévoile !

Ce roman se déroule du jeudi 25 avril 1908 au vendredi 28 avril 2008. Douze dates jalonnent le déroulé de l’histoire du fils : un mariage, une naissance, une visite à Paris,… les évènements de la vie qui seront des clefs pour comprendre et reconstituer le puzzle de l’histoire du fils.

Mère lointaine et intermittente, et père fantôme

Le fils, c’est André. Sa mère Gabrielle a 37 ans à sa naissance et son père, beaucoup plus jeune, restera inconnu.

On saura que cet enfant est né d’une histoire d’amour, d’une passion. Mais Gabrielle va aussitôt confier cet enfant à sa sœur, Hélène, et à son beau-frère, Léon. André grandit à Figeac, en famille avec les trois cousines, la mémé, le pépé, entouré d’amour. « Ils avaient gardé ce trésor, ils avaient gardé André, Dadou, entouré d’amour, de tendresse. Il était l’enfant dans le dos d’Hélène et de Léon, le surnuméraire chéri et choyé » (p. 132).

Gabrielle habite à Paris. Elle aime aussi garder sa liberté et son indépendance. Elle vient voir son fils deux fois par an. « Elle débarquait en Parisienne, chapeautée, gantée, finement chaussée, toilette ajustée, bagage soigné, » (p. 147).

Il n’y a aucune ambiguïté pour André. Il appelait sa tante Hélène « maman », et disait « ma mère » pour Gabrielle. Gabrielle est sa mère et on ne connait pas son père. Il a toujours su la vérité. « André sait que ce père existe, forcément, ou a existé avant sa naissance, tandis que ce père ne sait peut-être pas qu’il a un fils, André Léoty » (p. 61). Parfois, il aurait préféré qu’Hélène et Léon soient ses vrais parents et ses cousines ses vraies sœurs.

Quand André sera assez grand pour faire le bilan, il pense : « mère lointaine et intermittente, certes, et père fantôme » (p. 135), mais il avait été un enfant aimé. Il épouse Juliette. De ce mariage d’amour naît Antoine.

Le moment venu, André dit à Juliette parlant de ce père inconnu : « cette année je le cherche, je le trouve je veux le voir » (p. 108).

André bien aidé par sa femme, Juliette, puis par son fils, Antoine ; tous ensemble vont remonter l’histoire.

Ce roman est plein d’optimisme et de générosité. La grande qualité d’écriture de Marie-Hélène Lafon transcende cette histoire qui aurait pu être dramatique pour livrer un récit d’amour et de bonheur de vivre.

Ni pathétique, ni à l’eau de rose.

Toutefois, on peut se poser la question de savoir si la tristesse n’est pas la difficulté à devenir père et à être mère. Une invitation à réfléchir sur la maternité et la paternité.

Marie-Hélène LAFON est une professeure agrégée et écrivaine française.
En 1996, elle commence à écrire nouvelles et romans.
En 2001, son premier roman « Le soir du chien » est récompensé par le prix Renaudot des lycéens. En 2020, « Histoire du fils » est lauréat du Prix Renaudot. Ce roman se déroule dans le Cantal, une région qu’elle connaît bien puisqu’elle y est née, elle y a fait toutes ses études secondaires

avant de partir étudier et enseigner à Paris.

Très belle lecture.

Catherine Ménard-Février 2021

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