Le port dans le pétrin #7

Un feuilleton policier humoristique, écologique et local, conçu et produit par l’atelier d’écriture de la Bibliothèque municipale animé par Jean-Yves Ruaux avec le concours de Patricia Barthélémy, Valérie Boulanger-Raichman, Anne et Laurent Champs-Massart.

Épisode 7
Une perche passait
par-dessus les toits

Les Massalle entrèrent dans le bureau de Mitsuko. Par chance, Le Guennec était parti enquêter du côté du Bar des Dinantais. La capitaine et les écrivains-voyageurs étaient seuls. Ils pourraient mieux parler.

– Madame Durand, commença Corine, définitivement, nous n’appartenons pas à la Franc-Boulangerie…
– Le Guennec pense le contraire, répondit Mitsuko. Il pense que vous avez assassiné Marilou Raguenel, franc-maçonne, pour mieux imposer la Franc-Boulangerie en Bretagne. N’oublions pas que Kim Hong-Kang, le fondateur de la nouvelle secte, passe pour avoir tué le Vénérable de la Loge maçonnique de Sydney… Il y voit un parallèle.
– Nous ne connaissons pas Kim Hong-Kang !
– Pas personnellement, peut-être. Mais vous le connaissez.

 De la main de la victime

– Certes, nous sommes longtemps restés en Corée. C’était uniquement pour y étudier la Franc-Boulangerie.
– Je sais que le sujet vous est familier. Votre bibliothèque est pleine de…
Et la capitaine sortit de son tiroir Levez les pâtes contre le mur, le livre coécrit par les Massalle. C’était la copie de Le Guennec, qu’elle avait trouvée sur son bureau. Le livre était annoté de deux encres de couleurs différentes.
– Le Guennec l’a lu. Les annotations en bleu, ce sont les siennes, dit-elle.
– Et qu’a-t-il écrit ?
– Sa rancœur contre la Franc-Boulangerie.
– Et les rouges ?
– De la main de la victime.

Mitsuko ne savait si elle pouvait se fier aux Massalle. Elle décida de tenter quelque chose :  déballer à vif une information confidentielle.

– A l’autopsie, l’estomac de Marilou s’est révélé plein de pâte crue.

Les Massalle s’en décrochèrent la mâchoire en simultané. Cette surprise… Dès lors, elle sut qu’ils étaient innocents.
 
Asphyxiée de l’intérieur

– Or, elle était allergique au gluten.
– Asphyxiée de l’intérieur, fit Gilbert…. Au fond, c’est très franc-boulanger…
– Capitaine, le corps de Marilou n’est pas apparu chez nous, comme ça, par magie. Il est forcément entré d’une manière ou d’une autre. Or, un corps, cela se voit. Et qui a vu quelque chose ? Personne. Ou presque…

Mitsuko tendit l’oreille.

– Car nous aussi, nous avons fait notre petit tour… dirent les Massalle.

Bien évidemment, ils n’avaient pas été poser de questions au mystérieux restaurant coréen poussé du jour au lendemain dans le centre-ville. Mais ils avaient fureté sur le port.

– Ceux de la péniche-atelier, en bout de quai, n’ont rien vu. Bien sûr. Trop loin du n° 34.

Crédit photographique : Jean-Yves Ruaux.

– La serveuse des « fous de la crêpe » n’a rien remarqué de spécial, elle non plus. Sauf vers midi, un client, qui avait projeté de la… hum ! partout dans les toilettes de l’établissement. Horrible. Mais bon, ça n’a rien à voir avec l’enquête.
– Rien à la capitainerie, rien aux Terre-Neuvas. Quant à la conductrice du petit train touristique, elle a refusé de nous parler.
– Passons aux choses sérieuses, dit Corine. Nous avons eu l’idée d’aller causer aux gars qui travaillent côté Lanvallay. Ceux qui construisent la future brasserie. Ils passent leur temps dans leur grue. Et justement l’un d’eux, de là-haut, a vu quelque chose.  Une sorte de grande perche, en début d’après-midi, qui passait par-dessus les toits.
– A quel niveau ? fit Mitsuko, tendue.
– Après les Terre-Neuvas, sur la droite.
– A hauteur du n°34, murmura la Capitaine.
– La chose est passée derrière les maisons, dans la bande de forêt.
La capitaine songea aux frottements, relevés sur le lieu du crime, au niveau de la fenêtre qui donnait sur l’arrière.
– Et cette chose ?…
– L’ouvrier n’a pas su dire de quoi il s’agissait. Une rame, un mât en réfection, il ne sait pas. Comme une perche, un morceau de bois oblong…

Soudain on entendit un petit vacarme du côté du sas d’entrée.

– Voilà le commissaire, dit la Capitaine.
L’alcoolisme de Le Guennec ne faisait qu’empirer depuis la mort de la Dame au Triangle, qu’il avait aimée. Parfois, il parlait aussi d’une femme à ramure de cerf qu’il aurait rencontrée quelque part au Moyen Age ! N’y avait-il pas quelque chose d’étrange dans le comportement passionnel du policier ?

Crédit photographique : Jean-Yves Ruaux.

– Sortons par derrière, fit la capitaine. Suivez-moi, je vous emmène…

Les Massalle la suivirent, mais où voulait-elle les mener ? Allait-on comprendre ce qu’était cette perche de bois, vue par le grutier derrière le lieu du crime, le jour de la mort de la Femme au Triangle ?


Pour suivre
Épisode 8 – Rottweiler et Doberman

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