Les contes de Noël de l’atelier d’écriture #1

Les participant.e.s à l’atelier d’écriture que Jean-Yves Ruaux anime à la Bibliothèque municipale de Dinan vous offrent des contes qu’ils ont conçus et écrits lors de la dernière séance de l’atelier pour 2021, le 11 décembre dernier. La prochaine séance se tiendra le samedi 15 janvier 2022. Le sujet sera Les journaux intimes. Inscriptions gratuites auprès de mp.larsonneur@dinan.fr

Ces quatre contes seront publiés les samedis en janvier. Bonne lecture !

Le Korrigan des Petits-Fossés

Nous étions le 24 décembre. Et pour Louise, la fête s’annonçait morose. En arrivant au marché de Noël de Dinan, Louise remarqua aussitôt un monsieur étrange de petite taille qui se tenait à moitié camouflé par l’abattant de son échoppe. Il avait le crâne couronné d’une sorte de stetson en cuir aux bords courts qui laissait entrevoir de grandes oreilles. Une longue barbe rousse faisait cravate sur sa chemise blanche et deux tresses bizarres descendaient sur sa redingote grenat.
Tandis que la fillette tirait sur le bras de son père, le bonhomme la fixa longuement. Ses yeux brillants la firent frissonner. Et elle sut qu’elle avait raison. Le père de Louise n’écoutant pas, elle l’amena jusqu’à la cabane blanche sertie d’étoiles brillantes et de flocons nacrés.
Sur l’étal étaient disposées de magnifiques figurines. Elles étaient troublantes de réalisme. On aurait dit des enfants de porcelaine ou de mignons angelots.
En y regardant de plus près, Louise remarqua que leurs yeux bougeaient. Monsieur Poulpiquet – c’était son nom – cherchant à capter son attention engagea rapidement la conversation avec le papa. Peu après, ce dernier se détourna pour chercher des yeux son épouse. Mais elle avait déjà gagné les Dinannaises.

Magie, Rue des Dragons

« Très réussi ce marchand, on aurait dit un vrai korrigan ! J’ai envie d’en avoir le cœur net. » Une fois rentrée à la maison, un joli pavillon coiffé de tourelles pointues, caché dans la rue des Dragons, Louise parvint enfin à se faire entendre. Mais difficilement. Le père haussait les épaules, incrédule.
Sa mère, qui lui lisait des contes chaque soir, connaissait l’imagination de sa fille, mais se refusait à bouger du salon.

En revanche, Papa, pour calmer la jeune demoiselle accepta de retourner au marché à la fermeture. Ils attendraient tous deux, dans l’ombre, que le marchand quitte le lieu pour que Louise puisse constater son erreur.
Arrivant face au village de châlets-boutiques, ils se postèrent d’abord sur  l’esplanade de la Résistance. Ensuite, ils se glissèrent derrière l’un des grands arbres de la Promenade des Petits Fossés. L’homme rabattit l’auvent, verrouilla son stand puis s’éloigna, un baluchon de toile sur l’épaule.
Monsieur Poulpiquet arrivait droit sur eux. Lorsqu’il les dépassa, ils entendirent clairement : « Nous avons fait une belle journée mes enfants ! J’ai vendu sept de vos congénères, mais je dois me hâter de vous trouver des compagnons. Demain, il sera trop tard. »
Père et fille le suivaient, se faufilant d’arbre en arbre, toujours à couvert. Le commerçant semblait joyeux. Tout en chantonnant, il déposa son sac délicatement dans l’herbe après s’être posté face aux remparts, un peu après le Trou au Chat. La végétation grouillante masquait une porte minuscule à la base de la tour du Connétable. À peine la vit-il entrouverte que le père de Louise fonça sur le korrigan, le poussant et refermant aussitôt la porte sur lui. Attrapant le ballot d’un côté, sa fille de l’autre, Papa repartit en courant vers la voiture garée Rue du 8 mai 1945. Arrivés chez eux, Louise s’assit sans plus attendre sur le tapis devant la cheminée. Elle sortit les statuettes du sac une par une, avec délicatesse.
À mesure qu’elle les posait sur le sol, celles-ci se transformaient en un enfant. Seul un cœur pur avait le pouvoir de leur rendre leur forme initiale. La fillette qui n’avait ni frère ni sœur fut heureuse cette année-là de pouvoir fêter Noël bien entourée. Maman se dit que les allocations familiales avaient du bon.

Valérie Pivetta

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